Dans l'anthropologie de la littérature ivoirienne, Amadou Koné reprenait fort bien un proverbe Agni qui est, qu'on soit d'accord ou pas, la peinture exacte du parlement béninois. Ainsi, disait-il : " le poulailler est un palais doré pour le coq malgré la puanteur".
Autrefois amalgamé à tort ou à raison, le parlement béninois est clairement secoué aujourd'hui par une profonde crise morale. Ce haut lieu de la politique est malheureusement devenu un haut lieu de corruption où les consciences se vendent aux enchères.
Un véritable marché où le bannissement de la vérité et l'avilissement des mœurs sont malaisément érigés en pratique d'or. Rosine Soglo, doyenne d'âge de cette législature, l'a plusieurs fois martelée en reconnaissant l'achat massif des consciences. Et, par surprise, c'est le député Gildas Agonkan qui a confirmé ce soupçon nauséeux qui pèse lourdement sur les députés dans une causerie avec les Journalistes au Café médias. "Dans le cadre de la vulgarisation du projet de loi portant révision de la Constitution, chaque député a pris cinq millions de francs CFA" a-t-il laissé entendre. Bien avant lui, l'honorable Basile Ahossi avait demandé à ses collègues de venir jurer selon leur croyance, sur la bible ou sur le coran, s'ils n'ont jamais pris de l'argent. Étonnant n'est-ce pas?
Pourtant. Et pourtant, lorsque Rosine Soglo avait lancé la boutade, la conférence des présidents s'était réunie afin d'exiger d'elle des excuses publiques suite à sa déclaration. Une pure hypocrisie humaine que Sénèque appréciait d'ailleurs en ces termes: " Ö hypocrisie du visage de l'homme ! la pensée demeure invisible au fond du cœur ; les vices de l'âme se cachent sous la beauté du corps ; l'impudique se revêt de pudeur, l'audacieux prend un extérieur tranquille, la vertu devient le masque du crime, la vérité celui du mensonge, et la débauche affecte les dehors d'une vie sombre et austère."
Face à cette extraordinaire iniquité et cette singulière impudicité dont l'odeur infeste dégage au-delà de l'hémicycle, une incrémentation politique massive s'impose.
En clair, la corruption parlementaire est devenue une pathologie sociale qu'il faut expressément traiter.
Et l'extirpation de ce mal radical est indiscutable pour un parlement sain, pur, décent et crédible.
Romuald Bocco