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Patrice Talon sur « Moi Président » : « Le pays va mal et tout le monde le sait »

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Le 6 avril prochain, pour la 6ème fois de l’ère du renouveau démocratique, un nouveau Président va entrer dans ses fonctions. En attendant cette date, la campagne s’ouvre avec la présentation des projets de société des aspirants au fauteuil et pour cet entretien, nous recevons Patrice Talon, au cours de cette émission eh bien, nous allons décrypter son projet de société. Il partagera avec nous ses rêves. Il nous dira les réformes qu’il compte effectuer s’il était élu.

Monsieur Patrice Talon, vous êtes opérateur économique, marié et père de famille. Fils de cheminot, vous rêviez de devenir pilote de ligne, ce qui vous a conduit après votre BAC et un DEUG en maths - Physique à Dugny en France. Mais par un concours de circonstance, vous vous retrouvez depuis 1985 dans le monde des affaires. Mais depuis votre fauteuil d’opérateur économique, vous avez toujours gardé un œil sur la vie politique Béninoise. Ce qui vous a révélé dans ce registre, c’est bien sûr votre soutien en 2006 et en 2011 au Président Boni Yayi dont vous étiez proche ; puis en 2012 vous êtes tombé en disgrâce. Trois (03) ans d’exil en France et depuis votre exil parisien, vous avez lancé, vous avez dit votre volonté de briguer la magistrature suprême de votre pays et depuis ce temps, vous prônez la rupture.

Journaliste : Patrice Talon, est-ce que cette présentation de vous, vous convient-elle ?

Patrice Talon : Tout à fait!

Est-ce qu’il y a des choses que vous souhaitez ajouter?

Tout à fait! C’est assez exhaustif. C’est bien Patrice Talon. Merci !

Alors, maintenant que s’ouvre la campagne pour la présidentielle de cette année, comment vous sentez-vous ?

Je me sens bien, mais rempli d’émotion parce que c’est un moment important dans la vie de notre génération et prendre une telle décision, je mesure la gravité et le sérieux. Vous comprenez pourquoi je peux être très ému.


Au cours de cet entretien, nous allons aborder trois (03) grands volets : nous parlerons de la politique; nous parlerons de l’économie ; et nous verrons tout ce qui est lié au social. Commençons par le volet politique de cette émission, les réformes institutionnelles. Quand on parcourt votre programme, on se rend compte que pour la Cour Constitutionnelle; pour la Cour Suprême et pour la HAAC, vous envisagez des réformes. Est-ce que vous pouvez présenter aux téléspectateursaux auditeurs ce que vous comptez faire dans ces secteurs-là ?


On va commencer par la Cour Constitutionnelle si vous le voulez.

Avant les détails, il convient de dire que notre pays a besoin avant toute chose de réforme politique et administrative qui s’impose aujourd’hui. Vous savez, le pays va très mal et tout le monde le sait. Mais ce qui va mal et qui est la cause principale de notre malêtre, c’est la gouvernance. La mauvaise gouvernance est la cause principale du chaos que nous observons au Bénin. Le Bénin est devenu malheureusement une terre de grande pauvreté, de misère, de chômage, d’insécurité et même de honte. C’est malheureux que depuis quelque temps, les Béninois ont un peu du mal à avouer leur nationalité.

La situation que vous décrivez date de quand ?

La situation s’est dégradée au fil du temps.

Ce mal-être dont vous parlez.

Cela s’est dégradé au fil du temps. Nous avons espéré au lendemain de la conférence nationale aborder une période de grâce, de renouveau démocratique, de développement. Les régimes successifs ont contribué à leur manière à apporter une solution à ce problème de pauvreté et le dernier régime en passe de finir a soulevé un vent d’espoir en 2006, nous y avons tous cru et puis au fil du tempssituation s’est dégradée au point qu’aujourd’hui on a l’impression qu’au Bénin le mot espoir ne veut plus rien dire.

Monsieur Patrice Talon, quand vous réagissez comme cela, est-ce que ce n’est pas une critique facile d’un opposant puisque vous sembliez dire que rien ne va ?

L’heure n’est pas à cette critique. L’heure est aux diagnostics et aux solutions. Je ne suis pas dans la peau d’un opposant parce que le régime est fini. Pour nous, il convient de relever le défi du développement. Je suis dans la peau d’un candidat qui a à cœur d’œuvrer pour un bien-être plus général parce qu’au Bénin, ceux qui sont capables d’assurer aujourd’hui le pain quotidien ne sont pas nombreux. Ceux qui ont un minimum de confort sont plutôt rares et je fais partie de cette catégorie, je rends grâce. Je suis conscient que pour mon pays qui m’a tant donné, pour la grâce qui est la mienne, je peux présentement retourner l’ascenseur à mon pays.

Vous avez décrit tout à l’heure, si on s’en tient à vos propos une situation de chaos, on peut vous rétorquer que vous y avez participé puisque vous êtes l’un des soutiens du régime finissant.

Je suis Béninois, j’ai cru au régime finissant, j’ai contribué à son avènement, je l’avoue, mais nul n’est Dieu. Avoir la foi en quelque chose est plutôt noble.

Patrice Talon, vous aviez eu la foi en 2006 mais cette même foi vous a poussé à soutenir en 2011 le Président sortantpour le renouvellement de son mandat.

J’ai longuement répondu à cette question. Je ne sais s’il est opportun de revenir là-dessus puisqu’aujourd’hui, ce qui importe c’est d’apporter des solutions.

Quelles sont alors les solutions au plan politique qui sont contenues dans votre projet de société ?

Je disais tantôt que ce qui importe avant tout, c’est la réforme politique et administrative du modèle dans lequel nous sommes. La mauvaise gouvernance est l’unique mal dont nous souffrons parce que les Béninois pris individuellement sont remplis de talents, sont dynamiques et pourtant le Bénin est demeuré une terre de pauvreté et de honte même. Je répète, l’unique cause, c’est assez fort ce que je dis, c’est la mauvaise gouvernance. La mauvaise gouvernance a trouvé siège en ce que le pouvoir exécutif est devenu quelque chose de trop puissant, trop fort, destructeur. Je vais finir. Le pouvoir du Président de la République qui est le personnage principal de notre modèle politique est devenu quelque chose qui ne fait que la promotion, le rayonnement de celui qui jouit de ce privilège. Comme l’homme n’est pas Dieu, un pouvoir trop fort sans limite est forcément destructeur pour celui qui l’incarne lui-même et pour le peuple. C’est pour cela que je dis qu’après avoir observé à la loupe, ce que nous vivons, il est impératif de redonner la noblesse nécessaire, indispensable au pouvoir exécutif en replaçant les balises.

Quand vous diagnostiquez la situation, dans votre document d’ailleurs vous avez dit que le Président de la République est surpuissant, c’est un mot que je cite de votre projet de société ; est-ce que cela tient à l’homme ou est-ce que cela tient à la constitution qui lui confère des pouvoirs ?

L’homme a eu le mérite de révéler les failles de notre modèle et il a montré qu’on peut exercer le pouvoir exécutif sans limite en soumettant tout le monde, toutes les Institutions de contre-pouvoir, le peuple, les citoyens, tous ceux qui ont un talent, tous ceux qui ont quelque chose, une grâce, tout ce qui peut contrer ou contrarier le pouvoir exécutif et cela est devenu pour nous Béninois le modèle politique qui est le nôtre. Il convient dans le calme, la paix et la concorde, de faire le diagnostic, de l’avouer, de se convaincre que cela ne peut pas rester ainsi, sinon, ce pouvoir tel qu’il est, s’il est transmis tel quel aux générations à venir, aux hommes politiques à venir, ils vont l’exercer tel quel.

Pour ne pas le faire, par où commencer ? Quelles sont les réformes ?

Dans le concret, il urge de donner aux Institutions de contrepouvoir leurs rôles, leurs places, leurs missions en les libérant de l’influence du pouvoir exécutif notamment du pouvoir du Chef de l’Etat. On ne peut pas être une Institution de contrepouvoir et être nommé par le Chef de l’Etat, l’exécutif et dans le fonctionnement au quotidien être contraint de respecter, d’avoir l’oreille attentive pour le Chef de l’Etat. Ce n’est pas possible. On ne peut pas être efficace. C’est pour cela que les membres de la Cour Constitutionnelle doivent être nommés sans influence de l’exécutif.

Nommé par qui ?

Il y a plusieurs modèles pour mettre en place une Cour indépendante. Notre Cour actuellement est composée d’éminentes personnalités. Il convient de préserver la qualité des membres de la Cour. J’ai donné une esquisse dans mon projet de société en indiquant que le collège des magistrats, des praticiens du droit peuvent désigner, élire en leur sein des représentants au sein de la Cour.

C’est toujours le cas aujourd’hui. Quelle est la nouveauté dans ce que vous proposez ?

Ce n’est pas le cas. Les membres de la Cour Constitutionnelle sont désignés par le Président de la République et le Bureau de l’Assemblée nationale. La catégorie de membre pouvant provenir des techniciens parce qu’il faut noter que la Cour apprécie la conformité des actes par rapport à notre Constitution. Donc, c’est d’abord un rôle technique puis un rôle sociopolitique parce que la gouvernance, l’existence, notre vie n’est pas fonction que de l’appréciation technique de nos textes. Il faut tenir compte de l’environnement, du contexte, du social et de tout ce qui concourt à la vie en général. C’est pour cela qu’il n’est pas convenable que la Cour soit composée exclusivement de techniciens. Mais elle doit comporter une bonne partie de techniciens pour apprécier la conformité des actes, des décisions par rapport au contenu juridique des textes quirégissent notre vie. C’est pour cela que j’ai indiqué qu’il est nécessaire que les magistrats, les juristes soient membres de la Cour en position prépondérante et que ceux-ci soient élus par leurs pairs ; les magistrats élisent en leur sein quelques représentants, deux (02) ou trois (03). Les professeurs de droit de rang magistral, les avocats devraient également élire en leur sein des personnalités pour siéger au sein de la Cour. Il est à suggérer, c’est une nouveauté, que dans le collège des anciens Présidents, qu’il y ait une représentation, qu’en leur sein, ceux qui sont vivants, puissent désigner un représentant par exemple au sein de la Cour. Celui qui a été Président de la République pendant cinq (05) ans ou plus et qui n’est plus en fonction a le recul nécessaire pour apporter son expérience, sa connaissance de la vie en communauté pour éclairer les décisions à prendre par une Cour qui a besoin de réguler la vie dans notre pays au plan des Institutions parce que la Cour a également ce rôle : réguler. Il serait important également que le collège des anciens Présidents de l’Assemblée Nationale puisse désigner également un représentant parce que l’Assemblée Nationale est le temple d’exécution politique des lois qui régissent notre vie et carrément de l’animation de la vie politique. Donc, que ceux qui ont eu la chance d’assumer une fonction aussi importante puissent siéger au sein de la Cour serait quelque chose qui serait bénéfique. Voilà pour moi les grands corps devant désigner en leur sein leurs représentants au sein de la Cour pour que notre Cour soit une Cour indépendante et efficace.

Talon, pourquoi vous n’avez pas fait le choix d’ouvrir cela à tous les anciens Présidents par exemple et à tous les Présidents de l’Assemblée, vous avez souhaité que ce soit quelqu’un qui les représente ?

C’est ouvert à tous les Présidents.

Si on rentre dans votre schéma, est-ce que tous les anciens Présidents pourraient être membres de la Cour Constitutionnelle?

Si vous permettez, j’ai dit que ceux-ci vont désigner. On ne peut pas souhaiter qu’une Cour soit pléthorique. Si nous avons dix (10), vingt (20), trente (30) ou quarante (40), nous statuons pour maintenant et pour l’avenir. Il se pourrait que dans les années à venir, nous ayons vingt (20), trente (30) anciens Présidents de l’Assemblée vivants. Que nous ayons dix (10), quinze (15) anciens Présidents vivants. On ne peut pas avoir une Cour de cinquante (50) personnes. Elle ne sera pas efficace. C’est pour cela qu’il est important que ces corps soient représentés mais ils élisent une (01) ou deux (02) personnes pour siéger à la Cour ainsi que ces Institutions rassemblent les compétences qu’il faut tout en gardant la taille qui lui permettrait d’être performante.

Patrice Talon, quand on vous suit et quand on parcourt un peu votre projet de société, on se rend compte que tout est fait pour alléger le pouvoir du Président de la République et quelque part le pouvoir de l’exécutif. Mais, nous savons que depuis la conférence nationale, le Bénin a opté pour un régime présidentiel. Est-ce qu’en procédant de la sorte, vous ne déstructurez pas le typede régime pour lequel nous avons opté ?

Nous avons opté pour un régime présidentiel à raison. Mais si vous lisez notre Constitution, il est établi clairement que c’est un pouvoir présidentiel normal, mesuré et c’est bien pour cela que notre Constitution a établi des contre-pouvoirs comme la HAAC qui vous régit. Est-ce que la HAAC qui est appelée un pouvoir parce qu’on dit que la presse et les medias constituent un pouvoir distinct du pouvoir exécutif. La justice est un pouvoir distinct du pouvoir exécutif. Est-ce qu’il est normal qu’après l’avoir affirmé, mais que dans la pratique la justice soit dans la botte, soumise au pouvoir exécutif ? Si on affirme que c’est un pouvoir distinct, est-ce qu’il est normal que la HAAC reçoive des instructions de l’exécutif ? Vous êtes conscient que cela arrive bien souvent et que parfois même cela se révèle à l’opinion, on apprend des détails d’injonction de l’exécutif dans la vie de la HAAC. On ne peut pas vouloir quelque chose et son contraire. Ce qui est notre réalité aujourd’hui, c’est que notre Constitution dans son esprit est claire. Mais la lettre n’est pas exactement conforme à l’esprit de notre Constitution. C’est bien pour cela qu’il convient de rétablir, de faire les réformes pour que la lettre de notre Constitution soit conforme à son esprit. Nous aurons beaucoup à gagner parce qu’on ne peut pas compter seulement sur la bonne volonté, la bonne foi, la mesure personnelle des Présidents de la République pour que notre Constitution soit respectée et que l’exécutif reflète ce que nous souhaitons.

Patrice Talon, vous évoqueztantôt la HAAC, qu’est-ce que vous comptez faire ? Quelles sont les réformes au niveau de la HAAC ? Vous voulez donner plus d’autonomie à la HAAC quand on vous suit. Qu’est-ce qu’il faut faire ?

Il ne faut plus que le Président de la République désigne le Président de la HAAC. Il ne faut même plus que l’Assemblée désigne majoritairement les membres de la HAAC. L’Assemblée peut désigner une (01) ou deux (02) personnes. Pour le Président de la République, il ne faut pas parce que c’est ce pouvoir qui a besoin d’un pouvoir distinct ayant pour rôle d’être une mesure, un contrepoids. Le Président de la HAAC doit être élu par ses pairs au sein de la HAAC. D’ailleurs, je suggère que les membres de la HAAC soient majoritairement des professionnels parce qu’il s’agit de quelque chose de très technique. Les professionnels des médias ont la connaissance, ont le recul, ont l’expérience pour gérer, administrer ce qui régit la vie des médias. Et c’est bien pour cela que nous avons proposé que les professionnels des médias soient représentés majoritairement au sein de la HAAC et que le Président de la HAAC soit élu en leur sein. Que le Président de la HAAC soit un professionnel des médias.

Majoritairement, dans votre document quand on le lit, vous avez parlé de : six (06) professionnels des médias ; deux (02) de l’Assemblée Nationale, notamment le Bureau ; et d’un (01) qui provient du Président de la République pour faire les neuf (09). Est-ce que pour la Cour Suprême, l’autre Institution de la République où le Président est nommé par le Chef de l’Etat, est-ce que vous faites les mêmes suggestions ?

Oui ! Vous abordez la réforme de la justice. Tout le monde est conscient au Bénin que ce pouvoir n’a pas malheureusement toute la liberté de s’exprimer et d’exercer les prérogatives qui sont les siennes. Pour faire court, il serait nécessaire pour nous que la justice retrouve sa noblesse. C’est bon pour nous, c’est bon pour l’investisseur, c’est bon pour le Bénin entier, pour notre développement, pour notre économie, que nous ayons une justice crédible, bien formée mais avant tout une justice indépendante. C’est bien pour cela que le Conseil supérieur de la magistrature qui est la structure qui administre notre administration judiciaire, que ce Conseil soit véritablement indépendant ; que le Président de la République que nous appelons premier magistrat, ne joue plus ce rôle. Tellement le Président de la République se sent premier magistrat qu’il ne comprend pas et n’accepte pas que la justice soit indépendante de lui. Il convient donc que le Conseil supérieur de la magistrature soit réformé de sorte que l’exécutif n’y joue plus un rôle prépondérant, que le Chef de l’Etat n’y siège plus du tout et que le Conseil supérieur de la magistrature administre véritablement toute l’administration judiciaire avec compétence et indépendance. C’est pour cela que j’ai proposé que le Président du Conseil suprême de la magistrature soit le Président de la Cour Suprême qui est l’Institutions judiciaire suprême. Demain avec nos réformes, la Cour Suprême sera appelée la Cour de cassation parce que nous aurons la Cour des comptes qui sera extraite de la Cour Suprême. Doncdemain, ce sera la cour de cassation. Son Président va présider le Conseil suprême de la magistrature. Ce Président au sein de la Cour de cassation va être élu par ses pairs au sein de la Cour d’autant que les membres de la Cour sont des magistrats de haut rang et d’une probité avérée. Il faut regarder notre Constitution dans les dix (10), vingt (20) et trente (30) ans à venir. Aujourd’hui, on peut se poser la question, est-ce que les membres de la Cour Suprême dont certains ont peut-être atterri là-bas par reconnaissance, par clientélisme, est-ce que si c’est ceux-là qui doivent élire le Président de la Cour, est-ce que ce sera une élection qui va satisfaire notre ambition.

Patrice Talon, malheureusement le temps tourne vite et on a beaucoup d’autres aspects à aborder. Vous avez parlé dans votre projet de société de mandat unique pour le Président et on ne comprend pas comment quelqu’un qui gagne le pouvoir, qui a envie de l’exercer propose que le prochain Président n’ait qu’un seul mandat ? Expliquez-nous tout cela.

A quoi nous sommes confrontés ? Nous voulons des Présidents, des gouvernants rompus à la tâche, désireux et ayant donc la foi de travailler, de gouverner pour le bien-être de tous et non pour leur bien-être à eux. Nous avons établi un mandat de cinq (05) ans. Les Présidents en exercice finissant leur mandat ont la possibilité d’être candidats à nouveau. Qu’est-ce qui permet au peuple de choisir à nouveau un Président qui vient de finir un mandat ? C’est parce que nous pensons qu’en cinq (05) ans, on peut faire de bon boulot, on peut travailler, on peut révéler à ses concitoyens qu’on est bon

Vous pensez qu’on peut réformer un pays en profondeur en cinq (05) ans ?

Si vous permettez, notre modèle politique pense qu’au bout de cinq (05) ans on peut apprécier les prestations du Président sortant afin de lui donner une nouvelle chance de continuer ou pour changer de chauffeur, comme pour le dire vulgairement. C’est pour dire que nous pensons que cinq (05) ans c’est suffisant pour apprécier les performances d’un Président. Mais le mal essentiel aujourd’hui, et ce n’est pas seulement au Bénin, c’est le cas dans beaucoup de pays notamment dans les petits pays, les Présidents en exercice ont davantage la préoccupation du renouvellement de leur mandat que celle de la bonne gouvernance. Parce que bien gouverner, ce n’est pas facile, ce n’est pas aisé et ce n’est pas toujours facile pour ses partisans. C’est pour cela que si vous observez très bien, il y a un clientélisme absolu qui se développe au cours du premier mandat. Quand on veut nommer un ministre, un directeur, un responsable ; quand on veut faire la promotion d’un homme politique, les Présidents se préoccupent de faire la promotion de personnalités qui leur seront favorables à l’occasion des élections à venir et notamment à l’occasion de l’élection présidentielle qui leur permettra d’avoir un deuxième mandat. Ce facteur devient le facteur exclusif de gouvernance. Or ce pourquoi on élit un Président, ce n’est pas pour qu’il soit réélu mais c’est pour travailler tout simplement.

Alors, si le Président est élu pour travailler et donc il sera jugé à l’aune de ses performances de ses résultats. Mais que vaut un homme qui n’a pas de compte à rendre, qui n’a pas à retourner devant ses électeurs pour être jugé sur ses performances ? Et donc certaines personnes se disent qu’un mandat unique ne fait pas obligation au Président d’être performant.

Tout à l’heure, vous m’avez dit que j’ai soutenu le Président en exercice une deuxième fois en 2011 alors que le premier mandat n’était pas terrible. N’est-ce pas ? Pourtant c’est à l’occasion de ce deuxième mandat qu’il a gagné au premier tour. Vous savez très bien que dans les petits pays comme les nôtres, ce qui permet à un Président en exercice d’être réélu, c’est sa capacité à soumettre tout le monde. Quand tous les députés sont à sa solde, quand tous les maires sont à sa solde, quand tous les élus locaux sont à sa solde, quand tous les commerçants le craignent sont à sa solde, quand les partis politiques sont affaiblis, sont à sa solde, sa réélection est facile.

La question que René Talon posait tantôt, est-ce que le Président parce que c’est un mandat unique ne se dira qu’il n’a plus rien à perdre, donc il gouverne comme il veut ?

Non ! Ne soyez pas sourd à ce que je dis. Ce qui permet à un Président d’être réélu avec assurance, ce qui assure la réélection des Présidents, ce n’est pas son mandat, ce n’est pas ses performances, ce n’est pas ses résultats. C’est la manière dont il tient les grands électeurs. C’est la manière dont il tient tout le monde. C’est la manière dont personne n’est capable de lui tenir tête, d’être compétiteur contre lui. Quand vous n’avez pas un compétiteur, vous avez beau être mauvais, vous serez réélu. Alors, il faut en termes de choix de société, il faut éliminer ce qui est mauvais et ce qui est pire. On ne peut pas avoir le meilleur. Mais à défaut d’avoir le meilleur, il faut choisir le moindre mal. Un modèle politique qui permet à un Président de soumettre tout le monde et d’être réélu quelle que soit sa qualité est un modèle mauvais. Or, un Président en exercice qui n’est pas sujet à un renouvellement, qui n’est pas tenté par un renouvellement, qui n’a pas le démon du renouvellement de son mandat, sera un bon Président. En tout cas, il sera un moins mauvais Président.

A priori !

A priori ! Ce qui compte, c’est ce dont nous avons l’impression que c’est bon. C’est ce que nous avons l’impression que c’est un moindre mal.

 Il reste la question de la durée du mandat.

C’est une question importante.

Le mandat dure combien de temps ?

Parce qu’on peut estimer que cinq (05) ans est trop court pour mettre en œuvre un programme. Bien que dans notre Constitution actuelle, c’est cinq (05) ans qui est la durée du mandat pour faire ses preuves. Alors, faisons cette concession. On peut porter le mandat à six (06) ou sept (07) ans. Pour moi, les cinq (05) ans suffisent parce que plus on dure au pouvoir plus on est mauvais. En général, quand un mandat est court, on est dans la dynamique, on est dans la volonté, on est dans l’action. Plus il est long, plus on est perverti, plus on est corrompu, plus on s’installe dans l’aisance, dans le goût du pouvoir. On peut donc aller à six (06) ou sept (07) ans. Ce qui est mauvais, c’est la notion de renouvellement qu’il faut extirper du pouvoir pour que le Président se consacre au travail en oubliant qu’il lui est important d’avoir les députés, les maires, les commerçants, les entrepreneurs, d’avoir tout le monde à ses pieds pour avoir facilement un deuxième mandat. Il faut lui enlever cela.


Le Bénin ne vit pas en vase clos et nous tous on a suivi l’ancien Président du Nigeria Good Luck Jonathan a parlé d’un mandat unique, le Président sénégalais, Macky Sall, avant d’arriver au pouvoir, a parlé aussi de la possibilité d’un mandat unique et d’autres réformes. En Afrique où c’était déjà difficile de faire respecter les deux (02) mandats, en quoi est-ce que vous pensez que la classe politique dont vous n’êtes pas nécessairement membre puisse vous accompagner dans cette volonté d’asseoir un mandat unique ?

C’est en cela que le Bénin a un génie. Le Bénin, pour moi est un pays béni. Nous avons réussi la parce que nous sommes dans un environnement où nos Chefs d’Etat sont pour la plupart des jouisseurs de pouvoir, je mesure le terme que j’utilise, dans un environnement où la plupart des Présidents de la République se préoccupent de leur maintien au pouvoir. C’est parce nous sommesdans cet environnement que nous allons, nous, renoncer à ce que nous sommes capables de faire. Le Bénin est capable de renaître. Le Bénin est capable d’instaurer quelque chose qui va résoudre nos problèmes de mauvaise gouvernance et de sous-développement. Nous n’allons pas regarder ce qui se passe ailleurs. Le mandat unique n’est pas insolite. Cela existe dans d’autres pays. C’est vrai que ce n’est pas la panacée. Il ne suffit pas d’instaurer le mandat unique pour que le Bénin explose et que tout aille bien. Non ! Mais c’est un facteur favorable à la bonne gouvernance. Tout ce qui est favorable à la bonne gouvernance, nous allons l’instaurer parce que vous ne pouvez pas me dire que la notion de renouvellement du mandat apporte quelque chose que le non renouvellement n’apporte pas. Si c’est un facteur de bonne gouvernance, nous allons l’instaurer et nous allons faire la somme de tout ce qui est facteur de bonne gouvernance afin que les Présidents de la République du Bénin aient à leur disposition les contraintes leur permettant d’être de bons Présidents.

Patrice Talon, pour sortir du volet politique de cet entretien, parlons de la réforme du système partisan. Les partis politiques sont nombreux dans notre pays et vous préconisez que 0,5% du budget soit alloué à ces partis comme financement public de ces partis politiques. Pourquoi une telle proposition ?

Ce n’est pas 0,5% du budget. Non ! C’est 0,5% de nos ressources propres.

Quelle est la nuance ? C’est-à-dire ?

Je vais vous expliquer. Ce qui se passe aujourd’hui et que vous observez tous, c’est que la compétition politique n’est plus une réalité. La plupart des partis politiques ont perdu leur dynamisme, leur éclat. Je crois qu’on ne l’a pas vraiment connue mais l’émulation politique était en cours dans notre pays.

Mais les hommes politiques disent que c’est du fait des hommes d’affaires comme vous.

Oui ! Je vais finir. Pendant ces dix (10) dernières années, nous avons pu observer qu’à défaut de moyens, les partis politiques n’arrivent pas à exercer leur rôle qui est de compétir entre eux pour aller chercher des mandats locaux ou mandat national. Les Présidents de la République en fonction ont les moyens financiers d’appuyer les partis politiques de la majorité, de leur mouvance comme on le dit au Bénin. Et donc, le Bénin étant un petit pays pauvre, les autres partis politiques qui malheureusement ne parviennent pas à collecter les cotisations de leurs membres n’ont aucun moyen d’assurer la compétition face aux partis proches du Président en exercice. C’est déséquilibré et dans ces conditions, il n’y aura pas renouvellement, il n’y aura pas émulation. C’est ainsi que pour corriger cela, des opérateurs économiques et moi, en tout cas, en ce qui me concerne, j’ai souvent, je le dis et je n’ai pas à le cacher, j’ai souvent contribué à appuyer les partis politiques toutes tendances confondues. J’ai un plaisir et je dois l’avouer à apporter mon appui aux partis de l’opposition quand bien même je serais proche d’un Président en exercice.

En faisant cela, on vous dit que c’est pour peut-être préserver des intérêts si vous êtes dans tous les camps ?

Quels intérêts j’aurais ?

Mais vous êtes opérateur économique.

Je vous donne un exemple. En 2006, j’ai été un soutien visible du Président Boni Yayi. Il venait de faire en 2007, juste après un mandat, nous sommes allés aux élections législatives ; pour ceux qui sont observateurs de la vie politique, j’ai soutenu les listes de l’opposition, les listes de l’opposition au Président en exercice que je venais de soutenir et dont j’étais proche parce que...

A l’époque vous avez commencé à avoir des démêlés avec lui.

Alors, cela tombe bien. S’il est avéré qu’un Président qui n’a pas de critique, qui n’a pas en face de lui des partis politiques forts, capables de lui apporter la contradiction, il peut faire beaucoup d’erreurs. Donc, ce qui nous permet de voir qu’un Président, il a beau être un ami peut dériver, devrait nous amener à apporter des solutions si nous sommes de bons citoyens.

Patrice Talon, on était parti sur l’explication par rapport au 0,5%. Vous avez dit que c’est des ressources propres, malheureusement vous n’êtes pas allé dedans et le temps tourne. Il nous reste à aborder le volet économie et le volet social. Allez rapidement, s’il vous plaît.

Je vais l’aborder. Je disais donc qu’il est important que pour la vie, la survie, le fonctionnementdes partis politiques, il est impératif qu’ils aient les ressources nécessaires. Indépendamment de la volonté du Président en exercice, et indépendamment de la générosité parfois coupable des opérateurs économiques qui offrent leur soutien, alors, les deux solutions c’est la cotisation des membres et voilà qu’ils n’ont pas les moyens. Nous ne cotisons pas assez pour les partis politiques. Or, la vie des partis politiques est indispensable pour notre survie, pour la démocratie et pour la liberté. Nos ressources propres, c’est-à-dire nos impôts, les taxes que nous payons qui sont des ressources propres parce que le budget est composé des ressources propres et des financements des dons et autres revenus que l’Etat peut mobiliser. Ce qui est de nos ressources propres qui relèvent de nos impôts, les taxes que nous payons à notre Etat ; là-dessus, on peut prélever quelque chose pour financer les partis politiques mais pas tous ; parce que ce ne serait pas responsable. Les partis politiques qui ont une certaine taille, une certaine représentativité. J’ai suggéré que nous prélevions au minimum 0,5% de nos ressources propres. Aujourd’hui, les ressources propres du Bénin sont de l’ordre de six-cent-cinquante-milliards (650.000.000.000). 0,5% environ permet de libérer peut-être trois milliards (3.000.000.000) à quatre milliards (4.000.000.000) pour financer, pour apporter une allocation aux partis politiques représentatifs. Ce faisant, ceux-ci auront la capacité de jouer leur rôle, d’être des partis d’opposition, d’être des partisans du Président mais des partisans critiques, dignes. Ceux-ci vont échapper au financement des opérateurs économiquesqui parfois font des financements pervers, ce sont des financements qui sont liés, je suis bien placé pour le dire. Ce dont on a conscience même quand on a été parfois coupable, il faut avoir l’humilité, l’honnêteté de dire c’est mauvais, il faut le corriger. Quoique je ne me suis jamais senti coupable d’un financement pervers à un parti politique.

Patrice Talon, parlons à présent d’économie. Vous basez votre programme sur l’agriculture, sur le port, le tourisme, l’artisanat, comment tout cela va être articulé pour que si vous étiez élu que les Béninois sentent le bien-être ?

Le Bénin est sinistré dans tous les secteurs de notre vie économique aussi bien dans le secteur de l’artisanat, de l’agriculture, du commerce, de l’industrie que dans tous les domaines.

Quand vous dites sinistré, est-ce que vous n’exagérez pas un peu ? Les Béninois vivent quand même bon an mal an.

Je suis heureux de vous entendre dire. Cela veut dire que vous vous vivez bien. Ce n’est pas le cas de la majorité des Béninois.

C’est votre cas à vous ?

Je l’ai dit tout à l’heure. Nous ne sommes pas nombreux, ceux qui ont le pain quotidien ou ceux qui ont le confort, ceux qui sont capables de mettre une belle cravate, de belles chemises et des lunettes de la classe de celles que vous avez ne sont pas nombreux. Il faut en être conscient. Si nous restons sourds et aveugles à ce qui nous entoure, à la pauvreté qui nous entoure, nous neserons même plus en mesure de jouir de nos grâces, de ce dont nous avons la chance de bénéficier et que la grande partie n’a pas.

Dans le secteur agricole, par exemple, un secteur que vous avez pratiqué, que vous connaissez notamment par rapport au coton et aux autres filières, qu’est-ce qu’il y a comme réforme à faire ?

Il n’y a pas à réformer le secteur agricole.

Quelles sont alors vos propositions ?

Il y a à amener de la compétence, de la connaissance dans le secteur agricole. Permettez-moi de vous dire une phrase qui concerne tous les secteurs de l’activité dans notre vie. Le Bénin est un pays en construction, un petit pays en construction dans tous les domaines, dans le secteur de la santé, dans le secteur de l’éducation nationale, dans le secteur du commerce, dans le secteur agricole, nous sommes un pays en construction. Tout ce qui est en construction a besoin de compétence et de valeur. Le seul atout, paramètre susceptible de nous apporter de l’évolution, du développement au Bénin, c’est la compétence. Dans tous les domaines, il faut la compétence. Le secteur agricole, il faut que le Gouvernement, l’Etat et les responsables du secteur qui ont à charge de développer le secteur sachent de quoi il s’agit. Nous devons impérativement au Bénin faire la promotion réelle de l’agriculture intensive dans tous les domaines ; que ce soit le coton, le maïs qui relève de notre alimentation au quotidien, le palmier à huile, l’anacardier, le riz, nous travaillons sans compétenceNous ne mettons pas à la disposition des producteurs les techniques nouvelles.

Quand vous dites que nous travaillons sans compétence alors que dans nos universités, sortent des ingénieurs, il y en a qui nous viennent de l’extérieur, est-ce que ce n’est pas une insulte à l’endroit de ces personnes ?

J’ai dit que les Béninois sont des gens brillants, talentueux, remplis de dynamisme. Mais ce ne sont pas les ingénieurs sortis de nos écoles qui ont la décision de ce qu’ils vont faire dans le secteur agricole malheureusement. Ce ne sont pas des gens brillants qui décident.

Donc, vous voulez dire que c’est au niveau des instances de décision que cette compétence manque ?

Voilà ! Au Bénin, nous avons tout politisé à outrance. Le facteur compétence n’est pas le facteur de choix, de décision, de gouvernance. Il n’y a pas un seul domaine aujourd’hui au Bénin où le critère de choix, de nomination est la compétence.

Ceux que vous avez aidé à placer comme ministres en son temps étaient compétents au moins ?

Vous n’allez pas me ramener constamment dans ce que nous avions fait ensemble, ce en quoi nous avions cru, ce en quoi nous n’avons pas pu influencer les performances du régime. Nous voulons construire notre pays, nous voulons corriger ce qui ne va pas. Il faut en avoir conscience et quand on a conscience de cela et qu’on a des solutions, il faut s’appesantir sur les solutions.Alors, il faut relancer, il faut investir massivement dans le secteur de l’agriculture qui est le premier secteur de création de richesse, d’emplois dans notre pays. Les sous-secteurs du secteur agricole que ce soit la pêche, l’élevage ou le travail de la terre sont pourvoyeurs de richesse et d’emplois. J’ai donné dans mon programme les secteurs dans lesquels l’Etat doit investir en mettant l’accent sur la recherche. J’ai dit que nous allons créer six (06) départements, six (06) régions ou six (06) pôles de développement de sorte que dans chaque pôle nous fassions la promotion des cultures qui sont adaptées aux conditions climatiques, au sol de chaque pôle et également investir massivement dans la recherche. Aujourd’hui, la recherche agronomique est devenue un machin au Bénin. On ne peut pas faire de l’agriculture intensive sans savoir ce qu’il faut comme variétés, comme intrants, comme techniques culturales. Les producteurs sont livrés à eux-mêmes et puis il n’y a pas d’appui réel aux producteurs. C’est du clientélisme, c’est du populisme.

Toujours dans le volet économique de votre projet de société, on a constaté que par endroit sinon souvent vous parlez de défiscalisation, de défiscaliser de certaines entreprises. Mais lorsqu’on sait que le Bénin a une économie essentiellement fiscale, de quoi est-ce que le l’Etat vivra ? De quoi est-ce que l’Etat va disposer pour faire face à ses obligations lorsque vous, à chaque instant vous parlez de défiscalisation ?

Il faut avoir une politique fiscale intelligente. Les secteursdans lesquels l’Etat ne perçoit presque pas de revenus, de taxes, d’impôts et parce qu’il y a une politique fiscale non incitative et tout le monde est dans l’informel en plus cela inhibe l’énergie, est-ce que nous gagnerons à dire que dans ce domaine en disant aux populations rassurez-vous, pendant cette période il n’y aura pas d’impôts à payer ; rentrez dans le formel. Nous gagnerons à ce que le secteur retrouve de la vitalité, du dynamisme, le secteur crée des emplois, de la richesse, consomme. Dans un pays, quand il y a de l’emploi, du pouvoir d’achat, nous consommons et en consommant nous payons des impôts. N’oublions pas que les impôts et les taxes que nous collectons représentent plus de la moitié des ressources propres de l’Etat. L’impôt direct à travers ce que nous payons comme impôts sur salaire, impôts sur revenu, impôts sur les bénéfices commerciaux et industriels constituent seulement une partie de ce que nous avons Quand on te dit qu’on défiscalise, cela ne veut pas dire qu’on renonce à tout sur tout. Quand vous défiscalisez un secteur dans lequel l’Etat ne prélève presque rien aujourd’hui, quand vous défiscalisez ce secteur, vous ne perdez rien d’autant que l’Etat ne percevait rien.

A quoi bon de défiscaliser alors ?

Parce que cela attire l’investissement. Cela attire l’entreprenariat. Cela attire les innovations les gens viennent investir et s’emploient à rentrer dans le formel du secteur. Donc, vous ne perdez rien défiscalisant mais vous créez des conditions de dynamisme, de l’émulation, de créer de l’investissement. Ce faisant, vous créez des conditions pour créer de l’emploi, de la richesse et quand il y a la richesse, il y a la consommation et vous prélevez les impôts sur la consommation puisqu’on paye les taxes, la TVA sur le pain, le riz et tout ce que nous consommons. Donc, un peu d’intelligence parce que la nature humaine est complexe et parfois il faut savoir donner quelque chose pour créer de l’envie, de la volonté, de l’énergie, de l’émulation et après prélever ce qui est nécessaire que l’Etat prélève parce qu’entretemps on a créé un corps de développement.

Monsieur Patrice Talon, pour que l’économie marche, il faut de l’énergie. Qu’est-ce que vous proposez pour que l’énergie, je veux parler de l’électricité par exemple de notre pays, on soit beaucoup plus indépendant si on peut ainsi dire ? Surtout que dans votre projet de société on n’y retrouve pas vraiment trace comme d’autres secteurs où vous avez dit clairement ce que vous voulez faire.

L’énergie électrique pour notre pays, pour un pays moderne de nos jours est un peu comme le sang qui coule dans nos veines. Sans énergie, il n’y a pas de vie et c’est pour cela que c’est une question prépondérante, primordiale.

Mais vous n’en avez pas parlé.

Il faut avant toute chose investir, consacrer toutes nos ressources pour régler le problème de l’énergie. Nous en avons besoin dans nos villes et dans nos campagnes. Dans nos campagnes, on n’a pas besoin que des lampadaires. J’entends dire qu’il faut donner des lampes torches, delampadaires à tout le monde dans les villages et consorts. Et vous oubliez que dans les villages il y a du développement agréé, il y a des usines dans les villages, dans nos campagnes, dans nos contrées. Il y a des moulins, il y a la menuiserie, il y a l’artisanat, il y a des soudeurs. Il y a tellement d’activités. Il y a des coiffeurs, des coiffeuses qui ont besoin également d’énergie. Nous ne pouvons pas réduire nos villages seulement à l’énergie, à la lumière, à l’énergie du ménage domestique et oublier que notre pays a besoin de l’énergie dans tous les départements et même dans les villages pour que le développement ne soit pas seulement une affaire de ville parce que nous devons développer notre Bénin surtout dans les régions pour faire face au problème de développement global.

Pour cela, qu’est-ce que vous proposez ?

Je viens de dire que c’est très simple. Il n’y a pas de mystère à faire, il faut arrêter de gaspiller parce que nos Etats gaspillent beaucoup dans le confort, la promenade et dans le populisme. On a besoin d’argent et de moyen avec un investissement pertinent. Les choix que nous avons eu à opérer comme Maria-Gléta sont liés exclusivement à l’incompétence parce que le Bénin à quand même investi beaucoup d’argent. Il faut investir non seulement les moyens nécessaires mais il faut que ce soit en compagnie de compétence.

Où trouve-t-on les moyens pour investir ? M. Patrice TALON.

Nous avons investi quarante milliards (40.000.000.000), cinquante milliards(50.000.000.000) ; là nous avons bien trouvé n’est-ce pas ? A côté le Togo, on a fait autant sinon moins et cela fonctionne. Je viens de vous dire que nous mobilisons tous les ans en ressources propres plus de six-cent milliards (600.000.000.000). Nous sommes capables de passer à huit-cent milliards (800.000.000.000), neuf cent milliards (900.000.000.000) rapidement l’année prochaine parce qu’il y a beaucoup de perdition, il y a beaucoup de fantaisie dans la gestion de l’administration des régies et nous pouvons mobiliser beaucoup plus qu’on le fait aujourd’hui deux-cent milliards (200.000.000.000) à quatre-cent milliards (400.000.000.000) pour que notre budget de fonctionnement soit réellement au-delà des mille milliards (1.000.000.000.000) jusqu’à mille cinq-cents milliards (1.500.000.000.000). Nous l’avons, nous l’avançons. Vous entendez que nous annonçons un budget de mille cinq cent milliards mais le budget n’a jamais été exécuté à plus de mille milliards parce que nous mobilisons en ressources propres moins de sept-centmilliards (700.000.000.000) et nous allons auxfinancements, aux crédits hors de nos ressources propres moins de trois-cent-milliards (300.000.000.000) à peu près ou maximum. Cela veut dire que nous sommes imperformants. Un pays jeune, dynamique qui part de zéro, qui ne dispose de six-cent (600.000.000.000) milliards à sept-cent milliards (700.000.000.000) de ressources propres peut aller chercher quatre-cent milliards (400.000.000.000) ou cinq-cents milliards (500.000.000.000) de financement. Si nous avons un Etat crédible, un Etat de personnes compétentes, qui savent où il faut trouver l’argent, quels sont lesmoyens, quels sont les discours, quelles sont les techniques, quels sont les projets qu’il faut présenter et la manière dont il faut les présenter pour mobiliser les ressources nécessaires. C’est pour dire qu’avec une gouvernance de gens compétents, qui savent de quoi ils parlent, un pays dans lequel la crédibilité de l’Etat est restaurée, nous pouvons mobiliser les investissements nécessaires qu’il faut pour compléter nos ressources propres qui devraient aussi...

Concrètement, comment vous comptez le faire parce qu’on a vu des pays qui vont faire des levées de fonds et autres. Alors, pour vous, pour financer toutes les idées énoncées dans votre projet de société, comment est-ce que vous comptez concrètement le faire parce que la crédibilité seule suffit-t-elle à mobiliser les ressources ?

Qu’est-ce qui a fait que la Côte-d’Ivoire, tout récemment est allée mobiliser des milliers de milliards sur le marché international ? C’est lié à la crédibilité, à la compétence des gens qui gouvernent. Quand vous savez de quoi il s’agit et que vous savez le faire ; que l’Etat est crédible, que l’Etat respecte sa signature, ses engagements, c’est un capital énorme de confiance. Moi je suis un fils de pauvre. Je suis parti de zéro, de rien du tout. Je suis arrivé à un stade où j’ai compris que le plus grand capital, c’est la confiance que peuvent-vous faire vos bailleurs, vos financiers. Je veux vous rassurer d’une chose, pour six-centmilliards (600.000.000.000) que nous mobilisons avec beaucoup d’incompétence, avec beaucoup d’à peu près, on travaille de manière approximative, nous pouvons passer rapidement à plus de neuf-cent-milliards (900.000.000.000) de ressources propres avec un peu plus de sérieux dans la collecte des revenus qui sont dus à l’Etat. Nos régies doivent mieux fonctionner. A cela, nous pouvons mobiliser facilement auprès des Institutions internationales, parce qu’il faut avoir aussi le talent de savoir mobiliser des ressources. Vous savez que ce talent, je l’ai.

Patrice Talon, on arrive malheureusement à la fin déjà de cet entretien. On n’a pas pu parler du volet social, de l’éducation, de la santé. Est-ce que dans votre mot de la fin, vous pouvez résumer ce que vous comptez faire ? Il ne nous reste plus qu’une minute.

C’est vrai que le temps passe trop vite. Il nous faudra peut-être une heure ou deux. Je reviendrai et j’aurai l’occasion d’en parler. Vous savez, je suis candidat à l’élection présidentielle parce que j’ai conscience et bonne connaissance du mal qui nous ronge et je sais que nous sommes capables de relever le défi. Je sais que je suis capable d’apporter des solutions parce que j’ai bonne connaissance de ce qui ne va pas et de ce qu’il faut. J’ai la conviction qu’ensemble nous allons résoudre le problème de mal-être, nous allons instaurer un pays où la richesse, l’emploi, la sécurité, le développement dans les régions sera une réalité parce qu’on ne peut pas seul être heureux et quand le ciel vous accorde la grâce de vous assurer le minimum, vous pouvez en retour apporter ce que vous avez appris, ce que vous avez comme talent, comme chance à votre pays et vous rentrez dans l’histoire. Je voudrais avoir avec vous, avec mes concitoyens, l’occasion, la chance derelever le défi de la lutte contre la pauvreté


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